Plus de nature en ville!

Publié le 1 août 2023

De la nature en ville, il en faut – il en faut plus – il en faut beaucoup !
Vision d’écolo ? Oui, bien sûr, la nature en ville est l’un des chevaux de bataille de mouvements de protection de l’environnement et de défense de la biodiversité, mais aussi de nombreux groupes de citoyennes et de citoyens préoccupé(e)s par le développement urbain. « Il faut plus de nature partout » revendiquait déjà Pro Natura il y a une trentaine d’années.
Aujourd’hui, la nature en ville devient l’affaire de toutes et de tous dans le but d’améliorer la qualité de vie des habitant(e)s, pour donner, également en milieu urbain, une chance à la biodiversité, et pour contribuer à lutter contre le réchauffement climatique.

Améliorer la qualité de vie
En ville, la qualité de vie passe aussi par le maintien, l’extension et la création d’espaces verts nombreux. Les espaces verts exercent un effet apaisant dans le mode de vie urbain d’aujourd’hui, cassant la monotonie minérale de nos cités, introduisant de nécessaires ruptures dans la densification trop souvent vue comme une juxtaposition de constructions de tout acabit. Des espaces verts, il en faut beaucoup, de formes et d’étendues variées, de structure aussi complexe que possible. Par sa taille, par les services qu’il rend et en raison de sa longévité, l’arbre est un élément majeur de la nature en ville et ne peut manquer dans les espaces verts urbains. Quoi de plus relaxant qu’une petite pause sur un banc public abrité par la frondaison d’un arbre ? Quoi de plus apaisant que les frondaisons d’arbres qui frôlent les façades d’immeubles et partagent l’espace avec le bâti ?

Favoriser la biodiversité
Un espace vert, c’est un habitat naturel pour une foule d’oiseaux diurnes et nocturnes, insectes, chauves-souris et autres mammifères, plantes à fleurs, champignons, lichens qui y trouvent gîte et couvert. Amateur ou chevronné, le naturaliste se fait un plaisir d’en faire un terrain d’observation. Un espace vert en ville, ce peut être une allée d’arbres, un jardin de poche, un parc public, un étang ou un canal avec sa végétation rivulaire, un boqueteau voire une petite forêt, une haie, un arbre isolé, un arbuste, un groupe d’arbrisseaux …

S’adapter au changement climatique
Les villes constituent de véritables déserts bioclimatiques, un phénomène qui s’accentue avec le dérèglement du climat. Tout le monde connaît des portions de milieu urbain où l’espace complètement minéralisé, tout de béton et de bitume, se transforme en fournaise dès l’arrivée des beaux jours. Un phénomène qu’il est simple de briser par des îlots de verdure, à commencer par des arbres dont l’ombrage atténue la chaleur et l’aveuglement par le soleil, et maintient une appréciable humidité.

Revoir la planification urbaine
De la nature en ville il y en a déjà, bien entendu, mais il en faut beaucoup plus. Certaines villes sont à l’avant-garde et peuvent servir d’exemples ; dans d’autres cités, il y a encore à faire … Des initiatives isolées sont possibles et doivent être encouragées. Aujourd’hui toutefois, il faut passer à une vitesse supérieure et reconnaitre à la nature en ville la même importance que celle qui est accordée à la circulation automobile, au parcage, au réseau de canalisations ou aux conduites enterrées. Une occupation maximale de l’espace par les constructions ne peut plus être la seule référence de l’urbanisme. La préservation et le développement de la nature en ville doivent faire l’objet de planifications au même titre que les autres infrastructures urbaines. Les plans d’aménagement locaux doivent accorder à la nature en ville l’importance qui lui revient aujourd’hui et mobiliser les financements adéquats. Planifier, c’est aussi un moyen de prévoir les conflits d’utilisation suffisamment à l’avance. Il ne doit plus arriver, comme on le voit encore trop souvent, que les aménagements urbains signifient plus ou moins systématiquement l’abattage d’arbres qui seront certes remplacés, mais n’exerceront tous leurs bienfaits que des dizaines d’années plus tard.

La densification des constructions est une mesure mise en place récemment dans le but d’économiser le terrain à bâtir et de préserver notamment la zone agricole. Cependant, il faut densifier raisonnablement. A ce titre, la planification de la nature en ville doit attacher beaucoup d’importance à deux aspects : d’une part la juxtaposition du public et du privé pour créer un maillage vert du territoire urbain qui dépende aussi peu que possible des conditions de propriété. D’autre part la connexion des éléments naturels en ville avec l’espace extra-urbain, agricole ou forestier, pour créer des extensions paysagères, des « coulées vertes » permettant les nécessaires échanges au niveau de la biodiversité – et qui servent de cheminements aux citadines et aux citadins pour gagner la campagne, guidé(e)s par la nature …

 

Photo de l’article © Ville de Nyon

  • Jean-Pierre Sorg

    Jean-Pierre Sorg  est ingénieur forestier EPFZ, docteur en sciences naturelles, et vit aujourd’hui à Délémont. Il s’est perfectionné en sylviculture et phytosociologie, ainsi qu’en foresterie tropicale (gestion de forêts naturelles, reboisement, agroforesterie, foresterie sociale). Il a été chargé de cours et responsable d’un groupe de formation et de recherche en foresterie tropicale à l’EPFZ, et a siégé plus de 20 ans au comité central de Pro Natura.